Choregraphe | Directeur Artistique
Après un cycle de pièces composées de petites formes (solos, trios), Didier Boutiana entame avec le Sol oblige un nouveau cycle de création. Si la forme change, le fond aussi, gagnant en maturité. Sa danse, entre violence et fragilité, transpire la sincérité et l’humanisme. Avec Kanyar, la création 2017 de sa compagnie, Didier Boutiana portait symboliquement à la scène son parcours. Le jeune homme, capable de déployer une énergie phénoménale pour dompter l’obstacle et en faire naître du beau, est devenu un chorégraphe accompli.
Son enfance et son adolescence à la Cité RN4, quartier proche de la prison de la ville ouvrière du Port, ne le prédestinaient pas à fouler un jour les planches d’un opéra en Suède ou celles de salles mexicaines, sud-africaines, australiennes, slovènes ou encore parisiennes. Pourtant, à trente-cinq ans, Didier Boutiana a repoussé, grâce à la danse, les limites de son territoire bien au-delà de celles de son quartier et de son île. Et dans ce périple vers le monde et vers la création, il a su transformer chaque obstacle en marchepied et chaque rencontre en opportunité d’apprentissage.
Repéré par Soul City, il intègre en 2004 ce crew de danseurs hip-hop du Port. Retenu ensuite comme interprète par la compagnie de danse contemporaine Yun Chane, il quitte l’université et travaille notamment pour la compagnie Danses en l’R d’Eric Languet. La compagnie Soul City, émanation du crew, prend naissance en 2009 et sa première création, Haine Terre Rieur, dans laquelle danse Didier Boutiana, tourne dans l’Hexagone, en Afrique du Sud, en Australie et à Madagascar.
La rencontre de Vusi Makhanya marque alors une étape importante dans le parcours de Didier. Le Sud-africain lui propose de chorégraphier Body of knowledge. Sa première création pour Soul City : Reflex, en 2013, questionne une Réunion contemporaine, traversée par les émotions plus ou moins conscientes léguées par son Histoire.
Fort de son bagage hip-hop (meilleur Bboy de La Réunion en 2009 et 2010) et de ses expériences d’interprète contemporain, Didier invente une danse riche de ses collaborations multiples et de l’identité kaléidoscopique de son île.
Didier Boutiana parle d’Universalité. Il raconte l’exclusion, la marginalité, la fierté de la réussite acquise seul, la Fraternité, le rapport à l’autre, le sacré, l’identité ou encore la quête de liberté. Le chorégraphe le fait depuis La Réunion. Il passe ces thématiques universelles au tamis de la créolité et décode le monde par le prisme de sa culture métisse, mélange d’Europe, d’Asie et d’Afrique.